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La phobie scolaire

Quel est donc ce mal étrange qui semble toucher de plus en plus d’enfants ? Comment est-ce possible ? Avoir peur de l’école ?  Être malade de l’école ? Les parents sont bien faibles de se laisser mener par le bout du nez et de céder à tous les caprices des enfants !!!
Voici une phrase bien souvent entendue, ou seulement une pensée face à un enfant ne pouvant plus se rendre à l’école.
Alors, aujourd’hui, j’ai décidé de vous expliquer ce qu’est justement cette phobie scolaire. Il s’agit d’une réalité encore tabou, qui doit être prise en compte afin d’accompagner les familles concernées.

Un trouble anxieux

Le docteur Hélène Denis, médecin pédopsychiatre  au CHU de Montpellier (explique à juste titre que cette appellation de « Phobie Scolaire est galvaudée. » Il ne s’agit pas d’une peur, mais d’un trouble anxieux générant un empêchement à se rendre dans le lieu de scolarisation, hautement anxiogène pour les enfants en souffrance.

Il n’y a pas de règles absolues pour parler de Phobie Scolaire ou de trouble anxieux avec refus scolaire, chaque enfant développe ses propres symptômes, mais le point commun à la plupart d’entre eux est de souffrir du paradoxe suivant : ils veulent retourner à l’école, au collège, au lycée, mais leur corps ne peut plus et développe plusieurs symptômes les contraignant à progressivement s’isoler jusqu’à perdre toute socialisation.

Car oui, ils ne sont pas ces enfants capricieux et comédiens qu’on s’imagine, mais bien des enfants souffrant dans leur corps : nausées, vomissements, maux de ventre, diarrhées, migraines, chutes de tensions, évanouissements, crises d’angoisse, attaques de paniques, insomnies, anorexie, boulimie, scarifications, dépression, idées noires, pulsions suicidaires, les manifestations physiques du trouble anxieux sont nombreuses.

Mais quelles sont les origines d’un tel trouble ?

Il n’y a pas deux histoires identiques, mais nous retrouvons cependant des points communs. Beaucoup de jeunes souffrant de troubles anxieux avec refus scolaire ont d’abord été dans une posture de suradaptation. Souvent atypiques, ils ont tout fait pour surmonter et cacher leur différence, qu’ils soient HPI, DYS-, TDA, TSA, hypersensibles, parfois tout à la fois, ils se sont souvent sentis différents des autres et ont tout fait pour paraître. Ce sont des grands « camoufleurs ». Et puis un jour, Bim, ce n’est plus possible d’aller à l’école, trop peur, trop mal, ne plus arriver à respirer, les membres qui se paralysent, ils racontent tous la même histoire.

 Marie, 19 ans témoigne, elle se souvient  que tout a commencé au CM1, année de la séparation de ses parents et surtout année où elle a été victime de racket. Elle a continué, comme elle a pu, et en 4ème … plus possible. Des violences de la part des autres enfants, non reconnues par les enseignants dont elle attendait de l’aide, un mal-être de plus en plus profond, une impossibilité totale à aller en cours. Les choses s’enchaînent, changement de collège, un léger mieux qui ne dure pas, cours à la maison en SAPAD. Marie veut travailler avec les animaux, elle se dirige alors en seconde vers une section professionnelle pensant y trouver davantage sa place. Elle continue à subir des crises d’angoisse de plus en plus profondes, elle n’arrive plus à sortir de sa chambre. Elle est alors dirigée vers une structure spécialisée pour les hauts-potentiels ( ZEBRA) dont la visée première est de les aider à retrouver une dynamique d’apprentissage, l’envie de la découverte, la motivation personnelle et scolaire .
Elle finit l’année, alternant des soins à l’hôpital, puis elle repart dans son bac pro où elle ne trouve toujours pas sa place. Elle fait une transition vers une première générale, au CNED, cette fois, ne voulant plus, ne pouvant plus être dans une structure scolaire. Marie continue à être pétrie d’angoisse, mais elle est chez elle, et travaille, jusqu’à ce qu’elle intègre une section spécifique dans un « Micro-Lycée ». Tous les ados sont comme elle, en phobie scolaire. Il y a peu d’heures de cours, ils suivent le CNED en parallèle, ils se soutiennent avec l’aide d’enseignants dévoués, Marie avance.

Arrive le bac, toujours au micro-lycée, Marie est reçue mention Très Bien et acceptée dans une classe prépa BCPST pour se préparer à réaliser son rêve : devenir vétérinaire. La marche est trop haute, elle arrête au bout d’un mois épuisée, mais elle a essayé et elle continue son parcours vers la guérison. Bien évidemment depuis toutes ces années, elle poursuit une thérapie, elle continue à travailler sur ses angoisses et elle se prépare à partir en Espagne l’année prochaine pour intégrer une école vétérinaire.

Le parcours de Marie ressemble à celui de beaucoup de ces enfants qui à bout de forces tombent malades, n’arrivent plus à  faire semblant, s’isolent dramatiquement ,  ne peuvent plus s’adapter au système et dont la vie est un combat pour revenir vers un parcours plus normalisé. Cependant, il faut retenir qu’elle a réussi malgré toutes ses difficultés, qu’elle est dans une dynamique positive vers un avenir meilleur.

Du côté des parents

Les parents bien sûr sont démunis, ne comprennent pas ce qui arrive à leurs enfants qu’ils voient sombrer, impuissants. C’est alors le parcours du combattant pour eux, les rendez-vous chez le psychologue, le psychiatre, les différents bilans orthophonie, orthoptiste, ergothérapeute.  La difficulté à obtenir des rendez-vous, l’éloignement géographique, comment poursuivre son travail quand on ne peut pas laisser son enfant seul ?

Sophie se souvient, Noé était au CP lorsque les premiers signes d’angoisse sont apparus. Elle a fait en sorte de réduire au maximum le temps à l’école en supprimant les temps péri-scolaires et la cantine. En CE1, ce sont les attaques de panique qui le conduisent à un premier épisode de déscolarisation, Noé enchaîne alors les crises de larmes, les malaises vagaux mais revient progressivement en classe avec un emploi du temps aménagé. La rechute est sévère , en CM1, une véritable descente aux enfers. Noé est devenu apathique, ne communique plus beaucoup, ne mange plus, ne dort plus, ne joue plus et a des propos suicidaires. Il n’a que 9 ans. Sophie et son mari sont médecins tous les deux, ils ont heureusement un relai familial leur permettant de veiller sur Noé en leur absence. Noé est pris en charge à l’hôpital, puis suit une thérapie TCC (thérapie cognitivo-comportementale, ) avec un psychologue. C’est la thérapie reconnue la plus efficace pour le trouble anxieux. Noé est sous traitement, il récupère progressivement. Ses parents font le choix de ne plus le scolariser dans le système primaire et il intègre  l’année suivante une école démocratique, hors contrat dans laquelle il reste un peu plus de deux ans, retrouve progressivement confiance. A sa demande, il retourne dans un système classique en 5ème, avec un aménagement progressif du temps scolaire.

La famille de Noé a eu la chance d’avoir un relai familial, mais ce n’est pas toujours le cas. Certains parents doivent  interrompre leurs activités professionnelles et parfois les difficultés financières se font sentir. Souvent un diagnostic est posé, ils découvrent un haut potentiel, un trouble de la sphère autistique, des troubles dys, voire multi-dys. Ils peuvent alors mettre en place des rééducations, des thérapies, mais parfois rien du tout. Pas d’explication à cet empêchement de scolarité.

Les interlocuteurs

Il ne faut surtout pas rester isolé face à ces situations complexes. Les associations pourront vous venir en aide en vous donnant des coordonnées d’interlocuteurs régionaux, mais vous pouvez aussi vous faire accompagner d’un psychopédagogue coach scolaire spécialisé dans le suivi des jeunes en phobie. Il pourra vous aider à mettre en place les formalités, entrer en dialogue avec l’établissement scolaire, vous épauler dans la demande de PAP, PAI, etc … vous accompagner dans la préparation de réunions PPRE. Vous pouvez dores et déjà consulter le petit guide à destination des parents dont les enfants sont en phobie scolaire.
N’hésitez pas à vous faire aider, accompagner, ce sont des périodes difficiles pour les parents, très éprouvantes émotionnellement. Il faut savoir se faire aider afin de pouvoir aider son enfant.

Après la phobie

Ne vous découragez pas, il existe bel et bien une vie après la phobie et vos enfants ressortiront plus forts de ces épreuves.

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